Cette année, mes baskets se dirigent vers la Chine, que je ne connais pas du tout. Ma participation aux 250km du Gobimarch m’emmène au fin fond de cet immense pays, plein ouest, à la frontière pakistanaise.
Je suis passée par Canton, puis retour sur mes pas vers Urumqi. Qui connaît ? C’est la grande ville administrative du coin, 3 millions d’habitants, ce qui est une petite ville pour la Chine. C’est aussi la ville sur terre qui est la plus éloignée de toute mer.
Enfin, dernier vol vers Kashgar. Qui connaît ?
Pour couronner le tout, le nom de la course est trompeur car ce n’est pas dans le désert de Gobi qui est beaucoup plus au nord. Celui de Kashgar est le désert du Taklamakan. Qui connaît ?
Bref c’est la découverte de l’inconnu.
Le Gobimarch est une course de 250km en 6 étapes pour 7 jours, en autonomie. C’est à dire que l’organisation fournit les tentes, l’eau et l’eau chaude aux campements. C’est tout. Il faut emmener tout le reste, le plus gros à porter étant le sac de couchage et la nourriture, avec un nombre de calories obligatoires de 14000kcal. Je n’ai jamais fait ce type de course en auto-suffisance comme ça. C’est le même principe que le Marathon des Sables, pour ceux qui connaissent.
Nous sommes 163 coureurs de 42 nationalités différentes, dont 25% de femmes, soit 40 coureuses, ce que je n’avais jamais vu. A la Réunion, nous sommes contentes quand nous sommes 10% sur les courses ! Nous sommes une dizaine de français, dont beaucoup vivent en Chine ou à Hong-Kong, et je suis la seule réunionnaise.
Le règlement de la course me paraît draconien, il fait 20 pages ! Cela m’a demandé une préparation de longue haleine, conséquente, entre la liste du matériel obligatoire de 2 pages et celle des pénalités de 3 pages… Et moi qui aime l’aventure et l’autonomie !
En particulier, les fameux 14000 kcal à trimballer, ce qui en fait 2000 par jour. Il faut donc des aliments très énergétiques, légers, peu volumineux, et adaptés en composition à l’endurance sportive. Le contraire de ce qu’on trouve normalement, sauf les aliments spécialisés sous forme de plats lyophilisés d’expédition. J’ai opté pour des compositions de mon cru et à mon goût, d’où un usage intensif de la balance et de la calculatrice avant le départ. Je n’ai pas l’intention de porter une calorie de plus que ce qui est obligatoire, et ce doit être le plus léger possible, avec une répartition quotidienne équitable. Au menu ce sera un petit déjeuner à base de fruits oléagineux, diverses noix, noisettes, amandes et céréales, le tout mixé pour diminuer le volume, et à l’arrivée de chaque épreuve et le soir de la purée Mousseline mélangée à de la sauce déshydratée ou de la soupe déshydratée épaissie avec de la chapelure. Je n’aurai plus qu’à ajouter de l’eau chaude. Merci Nestlé ! Comme je trouve que tous ces délices manquent de protéines, j’emmène des gélules de spiruline. J’aurai aussi du thé vert et des tisanes revigorantes. Merci Maud ! C’est bien la prmière fois que je me nourris de cette façon. Tout cela pèse 2,5kg, à porter le premier jour… et plus rien le dernier.
J’ai sacrifié tout confort pour une semaine pour être légère, mais pour dormir, matelas ou pas matelas ? J’ai opté après mûres réflexions pour un morceau de tapis de gym très fin, 2cm d’épaisseur, juste la taille du dos, renforcé au niveau du bassin par le renfort du dos de mon sac qui s’enlève facilement.
La course se déroule à Kashgar, ville bien connue de Marco Polo, qui est sur l’itinéraire de l’ancienne route de la soie, dans la province du Xinjiang, entre la Mongolie et le Tibet. La ville est à 1000m d’altitude, elle compte 450000 habitants. C’est un centre historique, politique et économique, et a longtemps bénéficié de l’activité de la route de la soie. La région est peuplée principalement de l’ethnie des Ouighours, qui sont physiquement de type mongol, de religion musulmane, et dont la langue est d’origine turque. Oui oui, nous sommes bien en Chine.
Nous sommes à la limite du désert du Taklamakan, riche en pétrole et minerais, et entourée des chaînes de montagnes des Tian Shan et des Kulum Mountains, qui culminent à plus de 7000m d’altitude. Il y fait très chaud en été : +40°C et très froid en hiver : -40°C. Ouf, nous sommes en été ! C’est mieux quand on vient de la Réunion.
J’ai rejoint le groupe de la course le 8 juin, en débarquant à Kashgar la veille. Nous sommes logés dans le meilleur hôtel de Kashgar, c’est-à-dire que personne n'y parle anglais, et qu'on m'a casée troisième dans une chambre de 2. Les 2 autres n'y étaient pas à mon arrivée, mais vu le nombre de sacs dans la chambre, j'étais de trop. L’employé de l'hôtel, au demeurant très gentil, n’y comprenait rien. J'ai donc laissé mon sac, et je suis allée me promener.
Impossible d’oublier le chemin de l’hôtel, il est en face d'une immense statue de Mao, une des plus grandes de Chine, et à côté du parc du Peuple, il y en a un dans chaque ville. On n'est pas en Chine pour rien.
Kashgar possède la plus grande mosquée de Chine, qui est très ancienne. La vieille ville du quartier ouighour est en pleine rénovation à la chinoise. On rase tout et on reconstruit à neuf, heureusement dans le style adhoc. C’est donc un immense chantier. Les maisons sont en briques, recouvertes de terre pour certaines. De nombreuses ruelles sont en terre. Il y a également un immense bazar, les souks quoi, où l’on trouve de tout.
Pour finir je partage ma chambre avec Marta, une vénitienne, avec qui j’ai fait les 100km du Namib Desert en Namibie il y a 2 ans ! Et moi qui croyais que je ne connaissais personne sur le Gobimarch !
Le contrôle des sacs devait avoir lieu le lendemain matin, mais Marta a su je ne sais comment qu'on pouvait y passer le soir même. Autant y aller tout de suite avant la cohue.
Je me suis remémorée les 20 pages du règlement, mais quand j'ai vu le contrôle, j'ai compris que le règlement était du pipeau. Ce qui n'était pas pour me déplaire. Ils ont pesé mon sac : 7kg. Le médecin qui contrôlait les fameux 14000 kcal n'en revenait pas que j'avais tout noté et amené les emballages, comme c'était demandé dans ledit règlement. Il n'a rien contrôlé du tout, j'aurai pu mettre n'importe quoi. Il n'a même pas reconnu les électrolytes obligatoires, qui sont en fait des gélules de sel.
Du coup, j'ai enlevé des trucs inutiles de mon sac pour l'alléger, comme la crème solaire dont la quantité était imposée, j'en ai gardée qu'un tout petit peu, et les fameux électrolytes, j'en avais beaucoup trop dans la quantité imposée. Je risque une pénalité.
Je ne connaissais personne, mais au repas du soir, j'étais déjà apostrophée par Virginie qui avait repérée tous les coureurs de notre future tente.
Le lendemain matin, on a eu le briefing au petit déjeuner, puis contrôle du matériel pour les autres et farniente pour moi. On partait en bus en début d'après-midi pour le premier campement, donc déjà une nuit à passer par terre avant le départ de la course. Vu le nombre de coureurs, on a forcément attendu beaucoup avant que tout le monde soit là. Quelle barbe !
Sorti de la ville, on traverse la campagne agricole et verte, bien irriguée. Puis ça devient de plus en plus sec. On quitte la plaine pour aborder une rangée de petites montagnes très arides et très érodées. C'est très beau. La route devient piste et s'engage dans quelques canyons. On débarque sur un lac, bien encaissé. Le campement est à la sortie d'un petit village, avec les maisons toutes recouvertes de torchis.
Les habitants du village nous accueillent en tenue d'apparat et au son des tambours. Ils ont des drôles de chapeaux blancs et hauts en laine de chameau.
Je découvre ma tente, et mes 9 compagnons de chambrée : Virginie la belge qui vit à Pékin, la bande des 4 indiens, Mark l’anglais du Japon, Tim et Tom, la paire d’australiens inséparables, et Mo le saoudien qui sait déjà que j'ai fait la 555, quelle réputation ! Il faut dire que sur le site internet de la course, il y a un petit CV de chaque coureur, il a apparemment épluché tous les CV ! C’est cosmopolite et impec pour perfectionner son anglais. On rigole bien.
Les villageois nous font une petite fête, avec musique, chants et danses, ainsi qu'un jeu à cheval très populaire, où ils se disputent une peau de chèvre. Les ouighours sont d'excellents cavaliers. Il y a aussi quelques policiers chinois pour rappeler aux ouighours qu’ils sont en Chine.
Les femmes aiment bien avoir les incisives en or. Ca fait de superbes sourires !
Ce soir on peut encore manger un repas normal, qu'on a amené. Il y en qui ingurgitent déjà du lyophilisé, ils en redemandent ! Et voilà la première nuit sous tente, je vais étrenner mon super mini matelas sur un champ de cailloux par terre. O surprise ! Il s'avère impec et suffisant, et je dors bien.
Toute la Chine vit à l'heure de Pékin, qui est à 2 fuseaux horaires à l'est de Kashgar, si bien qu'il fait jour de 6h30 à 22h30. Bien sûr, il y en a qui se lèvent dès 5h pour un départ à 8h. Un peu tôt pour moi, surtout qu'il fait frisquet et nuit.
Ce matin, dernier petit déjeuner normal, j'ai de délicieux gâteaux ouighours aux noix, spécialité locale. Ca compte dans mes 14000kcal ! Et je ne les porte pas.
Je porte ma tenue désertique, couverte de la tête aux pieds. Ca protège des ardeurs du soleil, je ne tiens pas à me tartiner de crème toutes les 4 heures.
Me voilà sur la ligne du premier départ. Il était prévu 42km, mais on doit traverser des rivières et il a plu en montagne, le niveau d'eau est trop haut. L'étape est raccourcie à 32km, et on reprend la piste qu'on a fait hier en bus mais dans l'autre sens au lieu de passer dans les lits des rivières. Dommage ! Heureusement tout de même, c'est très beau. On commence par une partie encaissée entre les montagnes, ça monte et ça descend. Je vois Virginie partir vite devant moi, impossible de la suivre. 2 ou 3 filles me doublent. Rapidement, on me dit que je suis 5° femme. Moi, je vais à mon petit train-train habituel, sans forcer. Le sac est lourd et ce n'est pas agréable de courir, ce qui ne m'empêche pas de galoper dans les montées, comme j'aime ça. Je suis bien la seule.
On sort de la petite chaîne de montagne pour arriver dans une grande plaine. Sur la droite au loin, une autre chaîne de montagne nous domine, avec quelques sommets enneigés qui émergent de-ci de-là, dans la chaleur environnante. C'est très beau. On fera une vingtaine de km dans cette plaine, en empruntant des pistes ou pas de piste du tout, en traversant des lits de rivière secs ou pas secs, qu'il faut sauter avec un sac lourd sur les épaules. Le sol est aride, recouvert de tous petits buissons qui piquent. Heureusement, j’ai les jambes protégées.
J'aperçois une grande tâche verte devant vers laquelle nous nous dirigeons, ça ressemble à une oasis, sûrement le village d'arrivée. Youssef me rattrape, on finit ensemble les 5 derniers km, avec le vent de face. Il a besoin de quelqu'un pour rester motiver. Je cours à un rythme régulier, alors qu'il alterne course et marche. Pourquoi marcher sur une petite distance de 30km si on peut courir ? Il pourrait aller beaucoup plus vite. Peut-être le poids du sac. Les coureurs sont maintenant bien espacés, et je suis bien la seule à ne pas marcher du tout.
Voilà le village. On le traverse entièrement. Les femmes sont assises devant leur maison de terre et font la vaisselle, il y a un robinet d'eau devant chaque maison. Un karez, canal d'irrigation, longe la route. Visiblement Youssef a hâte d'en finir, il demande à tout le monde en arabe où est la mosquée, entre musulmans n'est-ce pas, mais apparemment personne ne comprend. Moi non plus, je me demande pourquoi il demande la mosquée. Il veut faire un arrêt prière ? Il est du Koweit. Pas du tout ! L'arrivée est à la mosquée ! Je n’ai pas vraiment retenu tout le roadbook, comme d'habitude !
On y arrive enfin à la mosquée de Youssef. On a avalé les 32km en 4h13, avec des épaules et des cuisses en compote avec ce fichu sac. Mais où est le campement ? O surprise, les tentes se sont transformées en maisons. Nous logeons ce soir chez l'habitant !
La maison ne paye pas de mine à l'extérieur. Elle paraît vraiment en terre. En fait elle est en briques recouvertes de torchis. C'est très isolant, il n'y fait pas chaud du tout. L'intérieur est très spacieux. On accède à une très grande pièce, bordée de grandes et larges banquettes recouvertes de tapis. C'est là qu'on va dormir. Ma "tente" est dans une petite pièce attenante, avec le même principe de banquette. Il fait très sombre dans notre pièce. On y découvre... des matelas ! rangés dans un coin. Ils trouvent vite preneuse. On doit loger à 80 personnes dans cette case. La cuisine est une petite pièce sombre séparée, les propriétaires sont chargés de nous fournir de l'eau chaude. Les toilettes sont dehors, avec les vaches. C'est un trou à fond perdu, perché en hauteur. Je suppose qu'on récupère nos bouses, comme celles des vaches, excellent engrais et combustible. Comme nous sommes dans une maison, il y a un robinet d'eau devant. Ni une ni deux, je suis une des premières à penser en profiter, à me laver et surtout laver mes chaussettes, qui vont me faire une semaine. Dans le matériel obligatoire, il y a 2 paires de chaussettes. J'en ai une pour courir, et une paire de bas de contention de récupération. Je n’ai pas pris de savates pour l’après-course. Je n'ai qu'une paire de pompes. Dans la maison je me ballade pieds nus, et je remets mes baskets pour aller dehors. Presque tous les autres ont des savates.
En défaisant mes chaussures, je m'aperçois que j'ai une ampoule sur un orteil. Moi qui n'en ai jamais. Je ne l'ai pas sentie du tout en courant. Je la soigne, et je ne la sentirais pas du tout du reste de la course. Comment a-t-elle bien pu apparaître, puisque je n'ai rien senti pendant toute la semaine ?
J'ai largement le temps de déguster une délicieuse purée. Ca a l'air bien meilleur que les plats lyophilisés spécial expédition des autres, ils mangent tous la même chose. Puis c’est l’heure de la sieste très agréable dans la fraîcheur de la case en écoutant de l'opéra. Je dois bien être la seule à écouter de l’opéra sur le Gobimarch !
Je m’octroie une petite promenade interdite dans le village, on n'a pas le droit de sortir du campement normalement. Vais-je choper une pénalité ? Le bouquet : l'organisation a bien précisé que les villages ne sont pas sécurisés, il ne faut pas y aller, et surtout pas une femme seule. Même pendant la course, les coureuses doivent traverser les villages accompagnées de coureurs, jamais seule. En fait, les gens sont hyper gentils, souriants et accueillants. Ils sont musulmans, il ne faut simplement pas se promener en tenue dénudée. Je n’ai jamais craint pour ma sécurité !
Je suis étonnée de voir que presque tout le monde est équipé en raidlight, venant du monde entier. L'équipement français est reconnu partout !
Comme j'ai toujours des frottements avec les sacs, c’est mon éternel point faible, je me suis bardée d'élastoplaste dans le dos et au niveau de la ceinture. Mince, ça frotte quand même. J’en remets une couche.
A toutes les arrivées, nous sommes accueillis par les tambours ouïghours. C'est sympa. Ils ont un rythme particulier.
Ce soir, soupe à la chapelure au menu. C'est super bon. Je fais des envieux. C'est l'heure d'aller se coucher dans ma maison en terre, sur les tapis et un bon matelas pour ce soir.
Demain, 39km au menu.
Avant, place au petit déjeuner d'oléagineux, mes noix et noisettes et amandes mixées. Ca intrigue tout le monde, et tout le monde veut la recette ! C'est calorique et plus léger que leurs plats lyophilisés, dont paraît-il le petit déjeuner est infect. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je ne les ai pas choisis.
La première partie du parcours est plate, avec toujours quelques sommets enneigés au loin. On croise quelques maisons kirghiz isolées, avec des moutons. Puis on entre dans une zone vallonnée, toute rouge. C'est magnifique. Je rattrape Cécile. C’est la rédactrice en chef du magazine Running pour Elles.
On traverse plein de petites rivières sèches très encaissées, c'est plein de petits canyons. Ca monte et ça descend tout le temps. Ca me plaît bien.
Ca y est, je quitte cette portion pour atteindre un large lit de rivière asséché, qu'on va descendre pendant un bon bout de temps. C'est un faux plat descendant, très caillouteux. Ca me va bien d'y courir, alors que beaucoup y marchent. Je double Emilie.
On rejoint une route, qui monte vers un col, puis redescend vers une autre vallée, avec une nouvelle large vue. Il y a un rocher avec un trou dedans qui le traverse. C'est beau. Emilie me redouble. Je ne force pas pour la suivre.
Dans la vallée, on aperçoit une oasis verte : notre village d'arrivée. On longe un gros karez avant d'arriver au campement, à la limite du village, au son des tambours. Je termine en 5h30, toujours 6° féminine.
J'ai trouvé l'étape plus facile que la veille, tout simplement parce que le sac est un peu plus léger. Les cuisses ne me tirent plus.
Le campement est dans un champ moissonné. La tente est sur un terrain plein de petits creux et bosses. Il faudra s'y faire.
Il est interdit d'aller se baigner dans le canal qui passe juste devant le camp. Quel stupide règlement!
Je m'octroie ma petite sieste musicale, qui deviendra un rituel quotidien, bien qu'il fasse très chaud sous la tente l'après-midi, surtout avec le fameux décalage horaire dû à Pékin.
Les lieux d'aisance valent leur pesant d'or. C'est un trou rectangulaire. L'endroit est entouré d'une bâche. Malheureusement, il y en a qui ne savent pas les utiliser, et qui visent mal. Bref, il y en a rapidement partout, et surtout pas dans le trou adhoc. Et il y en a qui ont l'air d'avoir des soucis digestifs... Heureusement, il y a un préposé ouighour, chargé de nettoyer et de mettre de la sciure régulièrement, voire de creuser un nouveau trou et déplacer les "murs".
Je comprends que dans le fameux règlement, il soit interdit de rentrer sous les tentes avec les chaussures. Question d'hygiène !
En outre, il n'y a pas de douche dans notre "camping". Il faut se laver avec des lingettes. Pas très écologique tout ça.
Mon matelas s'avère efficace sur le sol bosselé. Ceux qui n'ont rien souffrent vraiment et ne dorment pas.
Comme le volume du sac se modifie tous les jours, dans le bon sens puisqu'il s'allège, j'ai tous les jours de nouveaux frottements qui apparaissent. Je rajoute donc consciencieusement de l'élastoplaste tous les jours. Je vais finir comme une momie ! Pas très agréable.
Avec Marta, nous voyons soudain un coureur qui s’allonge par terre au milieu du campement. Marta a le réflexe immédiat d’appeler un médecin. Le gars est en train de faire un malaise.
Aujourd’hui 3° étape : 36km au menu du jour avec un dénivelé de + 1200m à se mettre sous la dent. Ca me va.
On traverse tout le village, avec tous les robinets d'eau devant chaque maison... On quitte le fond de la vallée, ça monte un peu, des escaliers, un énorme tuyau à franchir avant d'arriver à un autre village. Le coin est bien irrigué, donc habité. De plus dans la vallée, il y a un balai de camions. Une mine dans le coin peut-être ? On ne voit pas de campement de mineurs en tout cas.
On traverse une propriété privée. Ce sont des vignes. Le raisin est une des spécialités de la région. Les vignes sont grimpantes, ça ombrage le chemin. Un homme est en train de dépecer un mouton, autre spécialité de la région. Il finira en brochettes, avec du riz pilaf et des carottes jaunes.
On abandonne définitivement la vallée, et c'est une succession de petits canyons qu'il faut maintenant franchir. Ca monte et descend sans arrêt, avec des pentes fortes, mais courtes. C'est très caillouteux, sous forme de pierriers instables et de petits buissons épineux. J'impressionne tout le monde dans les descentes. Ils ont tous la trouille. Le soir on me demande même ma technique de descente.
On rejoint une route, qu'on longe sur une piste par une longue montée qui a l'air d'aller jusqu'au sommet de la petite chaîne de montagnes où nous sommes maintenant. Les sommets sont très découpés. C'est toujours superbe, avec des couleurs ocres. Le campement est à 2500m d'altitude, tout en haut, c'est le point le plus haut de la course.
Je termine de nouveau 6° en 5h36, ce sont toujours les mêmes filles devant.
Le camp est dans une combe près des sommets peuplés de chèvres. Cette fois, il n'y a aucun village dans le coin. C'est super beau. En tout cas les ouighours sont emballés. Ce soir, ils sortent la flûte en plus des tambours et entament une danse endiablée. Ils aiment beaucoup danser. Ca ne les gêne pas qu'il n'y ait que des hommes pour danser. Ils se déplacent lentement en écartant les bras.
Mmmmh ! J'ai des chips au menu aujourd'hui. Il faut bien atteindre les 2000kcal par jour.
Et toujours la petite sieste à l'opéra. Comme nous sommes en altitude, il ne fait pas trop chaud dans la tente. Je suis toujours la 4° à arriver dans notre tente. Il y a Mo qui est 2° au scratch, Virginie qui est un peu devant moi, et Tom. Les autres arrivent bien après, on est donc au calme pour la sieste.
Les frottements du dos empirent et les douleurs aux épaules s'estompent avec le sac qui s'allège. Mais tout ça ne me gêne pas. Un peu plus d’élasto et tout baigne.
Demain : 42km
Nous voici à la 4° étape. Elle sera magnifique.
De notre camp d'altitude, on monte jusqu'au col qui n'est pas loin. On dépose nos sacs pour un aller retour. Il n'y en pas beaucoup par terre quand je dépose le mien, je fais en sorte qu'il soit facilement reconnaissable au retour, car on a presque tous des raidlight, tous de la même couleur. On s'engage dans une gorge étroite aux parois verticales. Il faut passer quelques échelles. Puis on attaque une portion très raide avant d'arriver en haut. C'est sympa, on croise les premiers. Anne-Marie l'allemande est toujours 4° au scratch ! Impressionnante. Il faut juste leur laisser la priorité dans l'étroit passage. On monte jusqu'à Shipton Arch, un énorme trou dans la roche qui fait une arche, comme son nom l'indique. Le demi tour est au pied du trou. Un coup d'oeil de l'autre côté : une paroi verticale qui semble descendre jusque dans la vallée. Fabuleux. Dommage, je ne m'attarde pas. Ca en vaudrait le coup. Je redescends rapidement. Je croise tous les autres coureurs qui me laissent passer. Et naturellement, impossible de retrouver mon sac du premier coup, il y en a plein maintenant. C'est malin.
On suit désormais la ligne de crêtes. Magnifique. C'est très escarpé, avec toujours une succession de nombreuses montées et descentes, pentues et plus longues que la veille. Quel admirable terrain de prédilection pour moi ! Je me régale. Je double Virginie, et plein de mecs, avec ou sans bâtons. Ah, voici Nahila la mexicaine. Elle est tétanisée par le vertige en haut, sur un passage qui ne pose aucun problème. Je ne peux rien pour elle toute seule. Je demande derrière de la prendre à 2, un devant, un derrière. C'est comme ça qu'elle arrivera à passer.
On croise de temps en temps une ferme kirghiz isolée, avec les moutons et les chèvres.
Me voici en haut de la dernière crête, surplombant la vallée. Commence alors une longue descente. Tout d'abord toujours sur un sentier en crête, puis en rejoignant un fond sec de rivière qui s'élargit. Il n'y a plus de sentier, il faut passer dans les cailloux. Je suis à l'aise sur ce terrain, je saute de pierre en pierre pendant une dizaine de km sans me lasser. Je dépasse Emilie avec ses bâtons. Elle marche. Et d'ailleurs je dépasse tout le monde, enfin, il n'y a tout de même pas foule.
Le CP est tout en bas dans la vallée. On y arrive perpendiculairement à une rivière dont le lit est très large, avec plusieurs bras. Allez, c'est parti pour quelques bains de pied. L'eau qui arrive des glaciers est marron, l’érosion est importante. Je franchis les bras prudemment car on ne voit pas du tout le fond. En face sur la berge opposée, on débarque dans un village. Attention, rappelons la recommandation de l'organisation : les filles ne doivent pas traverser les villages seules. Je suis seule et je me sens très bien. Je n’hésite pas même à faire une petite halte dans le village. Je m'installe sur un tronc d'arbre à l'ombre pour essorer mes chaussettes. Emilie en profite pour passer, puis Nahila, ressuscitée. Enfin pas tant que ça, car je le reprends dans les champs à la sortie du village. Elle a l'air épuisée. Le sol est plein de sillons et n'est pas facile.
On longe le lit de la rivière, c'est plat pour la portion finale. On arrive sur une piste, avec des chantiers qu'on traverse. Je croise un bus plein... de coureurs ! Ah, on prend le bus à l'arrivée ? Et soudain une petite tente apparaît au détour d'un virage. C'est là ? Eh oui. On aurait dû normalement traverser encore la rivière une fois avant l'arrivée, mais il y a trop d'eau. Donc, arrivée surprise anticipée.
J'arrive 1 minute après Emilie. Nahila n'est pas loin derrière. Tiens, c'est au tour de Virginie de se pointer. Si bien qu'aujourd'hui je termine 4°, en 6h51. Devant il y a Anne Marie l'allemande, Stéphanie la canadienne et Emilie l'anglaise. Quant au scratch, de 28° le premier jour, j'ai gagné des places tous les jours suivants, et je suis 18° aujourd'hui.
Notre bus arrive, on embarque jusqu'au camp. Cette fois nous sommes près d'un cimetière. Toutes les tombes sont évidemment tournées plein ouest, vers la Mecque,.
J'ai toujours le temps de profiter de l'après-midi pour bien me ravitailler, et faire la sieste.
Il m'est maintenant impossible d'avaler les gélules de sel en course. J'ai toujours du mal à avaler les pilules en temps normal, mais en courant, ça ne passe plus. Déjà, j'en prends beaucoup moins que ce qu'il faudrait, et je les prends parce que je les ai et que c'est obligatoire. N'empêche, on était sensé être contrôlé là-dessus, et on n'a pas été contrôlé du tout. Donc je mords dedans. Beurk, c'est comme si je m'enfilais une petite cuillère de sel d'un coup. Mais ça passe bien.
La plupart des coureurs commencent à fantasmer sur la nourriture en ingurgitant leur plat lyophilisé d'expédition, ce n’est pas bon et … problèmes de digestion. Pendant que je me régale de ma purée et fais des envieux. Je ne regrette vraiment pas mes propres menus.
D'ailleurs rien ne me gêne, ni dormir sur mon mini matelas, ni ne pas me laver, ni ne pas changer de chaussettes, ni les repas. On transpire peu avec ce climat sec. Donc je trouve qu'on ne pue pas beaucoup. Rien à voir avec une arrivée du grand raid...
Le coin des ordinateurs est toujours pris d'assaut pour les gens qui ne peuvent pas se passer de leur blog et de leurs mails. Je préfère couper du monde informatique pendant une semaine. Profitons du désert et du camping !
Demain c'est la "longue marche" de 75km.
La journée commence par un transfert en bus de 2 heures. Un coureur de ma tente se débarrasse de ses lyophilisés expédition en surplus, qu'il ne veut plus porter. J'hérite d'un poisson - purée pour le p'tit déj. Cela s'avère mangeable et pas si mauvais, même si la purée est sous forme de croûtons. Ma Mousseline reste bien plus agréable. Le sachet fait 800 kcal, ça cale.
On part d'un village à 10h, heure de Pékin, donc 8h au soleil, mais 2 heures plus tard que d'habitude. Voilà qui nous promet de la chaleur en perspective.
On emprunte une piste qui se dirige droit vers la chaîne de montagnes enneigées qui nous domine, dans la vallée. Une beauté.
Tiens, des chameaux font trempette dans une mare. Ici, ce sont de vrais chameaux, avec les deux bosses réglementaires. Bien qu'on ne soit pas dans la partie sableuse du désert, qui n'est au demeurant pas loin, on en rencontre régulièrement.
La piste monte vers le CP1. Paméla l'américaine me double. Je la vois de temps en temps en début de parcours, et je la redouble systématiquement rapidement. Je ne comprends pas comment elle court, car elle paraît plus rapide que moi, mais ça ne dure pas. Dans la montée elle court, alors que je marche.
Quelques traversées de canyons se succèdent, montées et descentes. Je suis avec l'équipe des chinois. Puis c'est une montée douce. J'ai Nahila en vue. Elle n'avance pas vite par rapport aux jours précédents, et la distance nous séparant s'amenuise doucement mais sûrement. Je la rejoins au niveau de quelques maisons. Un vieux monsieur sur son âne avec deux petits marmailles qui piquent les petits drapeaux roses de notre balisage nous regarde passer, placide et souriant.
Je mange une barre juste avant le CP3, c'est mon premier repas, et un peu de jambon sec que me propose Nahila. Elle veut absolument rattraper Emilie, et demandera son avance à tous les CP. Elle est passée de 3° au classement général à 5° en deux jours, et n'a pas l'air de l'encaisser. N'ayant pas le même objectif, je cours bien plus détendue qu'elle. Elle me demande mon âge, visiblement inquiète que je puisse lui ravir encore une place. Mais je suis plus vieille, ça la tranquillise de ce côté-là, car visiblement elle cherche le podium par catégorie, le scratch lui échappant définitivement. Mes cheveux blancs ne lui font pas d'ombre. Certes, je suis la première vétéran depuis le début de la course.
On descend maintenant dans le lit sec d'une rivière, que des cailloux. La pente est très douce. Je cours sans effort, et pars devant Nahila qui n'aime pas les cailloux. On quitte la rivière, ça descend toujours doucement, il n'y a plus de chemin, juste toujours des cailloux et des petits buissons qui piquent, et les petits drapeaux roses plantés dans le sol, pour ne pas se perdre.
Les montagnes se sont rapprochées, les sommets sont dans de noirs nuages maintenant. Et voilà le tonnerre qui se met de la partie.
J'atteins une route et l'entrée d'un village. Ca monte. Je marche et Nahila me rattrape et me dépasse.
Le tonnerre s'est calmé, mais quelques gouttes arrivent. On est sensé être dans un désert ! Au moins, on évite la chaleur.
En haut du village, on quitte la route pour prendre une piste qui descend tout droit vers la vallée, sur des km et des km. Absolument tout droit.
Le village et sa verdure sont maintenant derrière. On retrouve un paysage très sec. Bref, mes éternels cailloux. Mais la piste est bonne. Toute droite. Ca descend, c'est facile.
J'arrive au CP5. Il y a des lits de camp pour ceux qui arriveront cette nuit. Nahila rend l'âme. Elle comprend qu'elle ne rattrapera pas Emilie qui est apparemment 10 minutes devant. Je la largue définitivement.
J'ingurgite une deuxième barre. C'est tout ce que je mangerai de la journée. Ca me suffit. J'ai sous la main du chocolat en poudre et mon mélange de noix, mais je n'en aurais pas besoin. Ce sera pour ce soir.
Nous longeons un karez souterrain. Les glaciers qui l’alimentent ne sont pas si loin. On voit régulièrement les bouches de contrôle, tuyau vertical qui sort de terre. Ca meuble la monotonie de la descente.
Je passe une station de pompage, il y a des digues de cailloux à franchir. Et c'est reparti pour la descente régulière. La vallée se rapproche inexorablement.
Un fort vent se lève, venant de la gauche, accompagné d'un énorme nuage de poussière. J'ai l'oreille gauche rapidement pleine de poussière. Et aussi plein les yeux, même avec les lunettes. Et voilà la pluie qui s'y met. Des gouttes énormes, heureusement parsemées. Mon oreille gauche se remplit d'eau. Tout mon côté gauche est humide, et mon côté droit est complètement sec, avec le vent.
Ca y est, je suis dans la vallée, très large. On la longe. La pluie cesse, le vent faiblit et je l'ai dans le dos maintenant. Que du bonheur, avec en plus un faux plat descendant. Et toujours le karez qui m'accompagne. Depuis que j'ai quitté Nahila, je suis seule.
Je m'approche d'une zone irriguée et cultivée. De jeunes peupliers sont plantés. On en trouve dans toutes les oasis. Ce bois est très utilisé. Je rejoins une route, qu'on longe dans un lit de rivière. J'arrive au Cp7, le dernier de la journée. Il reste 7km de piste. On voit bien au bout les arbres qui indiquent un village d'arrivée, au pied d'une petite colline ocre. Je cours toujours les derniers km, sans peine. Voilà un coureur qui me rattrape. Je ne l'avais pas entendu arriver. Je n'ai pas grand chose à lui dire, il a ses écouteurs dans les oreilles. J'ai horreur des gens qui courent avec leurs écouteurs et qui ne font aucun cas des autres. Il a visiblement du mal à courir et s'il m'a rattrapée, je le laisse rapidement en plan, simplement en gardant mon allure régulière.
Ca y est, j'arrive aux premiers champs. Du blé ! Il est vrai que le pain et les nouilles sont la base de l'alimentation des ouighours. Et des moutons aussi, également base de l'alimentation.
J'entends les tambours. J'y suis. Non, pas tout à fait, il faut franchir un cours d'eau à gué juste à la banderole d'arrivée. Je m'octroie un détour de quelques mètres où il est large juste d'un pas plutôt que de sauter. Pour les suivants, une planche aura été installée.
Le campement est paradisiaque. Une belle étendue d'herbe, ombragée par de grands arbres. Et le ruisseau devant. Voilà une bonne baignade en perspective.
Il est 20h20, j'ai donc mis 10h20. Quand je pense que j'ai fait mon dernier 75km en 15h. Evidemment, c'était le Caldeira Trail avec la montée du Tremblet, rien à voir ! Je termine 5° et 19° au scratch.
Comme il fait jour jusqu'à 23h, j'ai largement le temps de déguster mon chocolat, et de me laver dans le ruisseau, les fringues avec.
Les coureurs arriveront toute la nuit, et les derniers le lendemain matin. On a donc le droit aux tambours toute la nuit, mais je m'en moque, mes bouchons d'oreilles sont efficaces, et la tente se remplit progressivement, jusqu'au dernier. Car dans notre tente nous avons quelques bons, on aura 4 podiums au final, mais on a aussi le dernier.
Comme on attend les derniers le lendemain matin, il n'y a pas d'épreuve le lendemain. Toute une journée à ne rien faire ! Pour moi c'est dommage car je repartirai bien. J'ai mon opéra pour meubler. Je ne peux résister à un tour dans le village, ce qui est bien sûr interdit. J’y retrouve les coureurs de l'équipe chinoise. On mange des mûres, des fruits frais ! Ce n'est pas la même variété que celles de mon jardin. Les chinois peuvent parler en chinois avec les villageois ouighours, et une dame nous invite à rentrer chez elle. Elle nous donne du yaourt maison. Quel délice ! Il y a un bol plein. On me l'offre en premier. Puis je le passe au suivant. Mais politesse chinoise oblige, personne ne se décide à le prendre, ils se renvoient tous la balle. J'ai l'air malin à essayer de leur refiler le bol, dont ils meurent d'envie. Il finit par circuler pour tout le monde. Je n'ai pas compris comment a été choisi l'ordre des bénéficiaires.
Une journée complète au camp, inutile de préciser l'état des toilettes... Apparemment, les lyophilisés n'ont pas l'air de réussir à tout le monde...
Le soir, surprise, nous avons le droit à un arrivage de pain frais et de pastèque. Le pain ouighour est délicieux. Il se présente sous la forme d'une grande galette avec des épices, si bien que même sec, c'est un délice. Et la pastèque, n'en parlons pas !
Les médecins trimbalant une balance, j'en ai profité pour me peser. Ils nous avaient promis un amaigrissement garanti. Que nenni. Je suis toujours constante, au gramme près. 2000 kcal par jour, c'est trop pour moi !
Demain, ce sont les 15 derniers km.
J'ai décidé de faire ces derniers km à un bon rythme, le plus régulier possible. Le sac est maintenant léger puisqu'on a tout mangé. Mais il me frotte toujours à de nouveaux endroits. Quelle plaie ! Et un sac vide de 40 litres, ce n'est pas forcément la panacée. Même si le raidlight a des systèmes de réduction de volume.
Les 15km traversent un village. Mais on ne le sait pas à l'avance. Immense village. Ou petite ville ? Je ne sais pas. On ne sait pas trop où on est.
On part à 9h ce matin, donc grasse matinée.
Tous les villageois sont sur le pas de leur porte, à nous encourager et nous applaudir. C'est sympa. Nous emprunter une longue rue toute droite, c'est goudronné. Les maisons de terre sont disséminées. Les canaux et les peupliers bordent la route. Puis on traverse une rivière sur une piste. C'est le seul endroit où ça monte... de quelques mètres. Et on reprend la ligne droite de l'autre côté.
Je dépasse rapidement Nahila. Crevée la cocotte. Par contre Paméla me dépasse aussi rapidement. Elle est beaucoup trop rapide pour moi sur le plat. Je pense qu'elle aurait pu faire beaucoup mieux les jours précédents. Je laisse aussi Cécile derrière.
Je fais route un bon bout de temps avec Fabrice, et voilà qu'il stoppe soudain. Il s'est tordu la cheville ! Sur la route goudronnée toute plate et à quelques encablures de l'arrivée.
En traversant la rivière, je rattrape Stéphanie. Ca alors ! Elle a toujours été loin devant, elle est 2° au classement féminin. Mais elle est archi crevée, et sa 2° place ne craint rien.
La foule est de plus en plus dense sur le bord de la route, et les clameurs plus présentes. Maintenant, place aux tambours. Quoi ? C'est déjà l'arrivée ? Déjà fini ? Moi qui ne suis pas fortiche sur les 10km, je n'ai pas vu passer ces 15 là.
Une haie d'honneur d'enfants en habit d'apparat nous accueille à l'entrée de l'école.
J'ai mis 1h35, ce n'est pas mal du tout avec 250km dans les pattes, et je suis 5°.
C'est la liesse à l'arrivée. Surtout ça se succède sans arrêt avec cette petite distance, pas du tout comme les jours précédents. Du coup c'est très convivial.
Première chose que je fais une fois la ligne franchie : j'arrache mon rouleau d'élasto avec impatience. Ah, un peu plus de liberté !
Après une semaine de diète, la table est pleine de pizzas chinoises et de pastèques. Et de la bière ! De quoi m'égayer à l'arrivée !
Beaucoup de coureurs se drapent dans leur drapeau national pour les dernières foulées. J’avoue que n'aurai jamais penser à porter le drapeau français pendant une semaine pour franchir la ligne finale.
Franck, un français, fait sa demande en mariage à sa dulcinée venue l'accueillir sur la ligne d'arrivée, elle est chinoise. Avec la bague s'il vous plaît.
Pendant que les arrivées continuent, les enfants nous offrent un spectacle de chants et danses. Moi, je sirote ma bière.
Et voilà. Retour en bus à l'hôtel à Kashgar dans la foulée. Et une bonne douche ! Et des fringues propres et normales ! Marta me tartine de crème mon dos à vif, elle n'en croit pas ses yeux. Elle, elle n'a rien, pas le moindre petit frottement.
La seule commodité de notre hôtel **** réside en son sauna. Je désire en profiter, mais pas de chance, il est justement hors service. C’est un hôtel chinois…
Pour finir, je termine donc 6° au classement féminin, 20 minutes derrière Nahila. Et 19° au scratch, les trois devant moi étant des demoiselles. Et 1° vétéran. Ca me va très bien. Il paraît que le niveau féminin était très relevé pour cette édition
En récupération de cette semaine et de ses 250 petits km, j’enchaîne sur une randonnée de 5 jours au camp de base du Muztagh Ata, qui culmine à 7700 mètres. Je monterai à 4500 mètres, histoire de me reposer… Eh oui , j’ai un chameau pour porter mon sac, un guide qui me prépare des petits plats frais et un bon matelas en peau de mouton dans les yourtes kirghiz !
Recette du thé kirghiz : thé noir, sel, lait de yack. Délicieux !
Je remercie Logistisud, HCe, IDEA, STESI, Nestlé qui m’ont aidée à réaliser ce projet.
Isabelle